gamine émerveillée par les anciennes pratiques manuelles telles que la couture et la broderie,
fascinée par l'allure des machines à écrire et mieux intéressée par la famille des violons que par celle formée par les instruments populaires. enfant bizarre, silencieuse et quelque peu crainte des autres. après tout,
elle était héritière de cette grande famille, jouer dans son sens ne vaudrait pas de se faire ennemie du jeune couple qui lui avait donné naissance. abandonnée par ses géniteurs et
laissée sous la garde soucieuse de la gouvernante, son regard se dirigeait sans cesse, de la fenêtre du manoir, vers le jardin de la famille voisine. de là, la benjamine à la chevelure tressée pouvait apercevoir des écolières de son âge, jouant autour d'un arbres, leurs sourires dans les airs et des chiens blancs avec elles dans leurs délires. jalouser pour cette petite vision amusante, lui avait valu d'abandonner sa lecture pour les garder à l’œil, ces jeunes demoiselles, remarquant par la même occasion que la situation avait pour ainsi dire toujours été la même.
yuan délaissée et les autres enfants vivant ce que leur jeunesse aiguë leur permettait de faire. elle se voyait être éperdument envieuse, et sa collection d'antiquités ne pouvait guerre y remédier. elle s'était maintes fois imaginée à la place de l'une de ces filles sans que ce ne soit pour autant réel, l'illusion finalement jetée au placard, et le sortilège pour évanouir son sourire.
de toutes les façons, l'adolescente de sept ans plus tard ne s'en était plus vraiment préoccupée, suivant le fait que ses déceptions furent plus tenaces que son envie.
enfants au sourires arc-en-ciel face aux présents qu'on leur proposait après chaque visite et déconcertés finalement lorsqu'il n'y en avait pas. fallait-il donc que la demoiselle les rémunère pour le temps qu'elles lui accordaient. entre amis, cela ne devrait pas être gratuit ? alors non, yuan n'était hélas pas de ce monde de désespéré pour lequel tout serait idéal dans la satisfaction de leurs besoins. que ça lui tape sur les nerfs ou pas,
yuan ferait en sorte de s'élever à la façon de la princesse qu'on lui a toujours fait pensé être et ainsi dissimuler son angoisse dans une mine figée, inexpressive, neutre, hautaine; comme si elle s'en était toujours royalement foutue, de la populace.
quand même, elle n'avait pas été un monstre, cette princesse en exercice, comprenant vite que les choses n'étaient pas pareilles pour tout le monde, qu'il ne fallait pas s'attacher aux clichés et qu'elle devrait pouvoir
ravaler sa fierté et s'adapter si elle ne souhaitait pas rester dans l'ombre de la solitude toute sa vie. par chance, son âme en avait rencontré d'autres de plus dignes, de plus compréhensifs, de plus matures et de plus humains. yuan en avait même appris une chose importante, du collège, qu'elle n'était pas la seule à supporter, qu'elle n'était pas la seule à craindre. si elle pouvait ne pas en aimer,
il y en avait aussi qui se trouvaient dans cette même position par rapport à elle. après tout, elle n'était guerre parfaite, et les autres n'étaient pas les seules à devoir faire des efforts. aussi, il n'existait aucune formule magique susceptible d'arranger les choses comme elle le voulait sur le coup, et quand elle allait se réveiller pour le jour suivant,
rien ne la ferait dire qu'il aura été question d'un cauchemar, c'était donc à ses pauvres mains de coudre le tissu malgré la fragilité de celui ci et l'aspect pointu de l'aiguille.
dans ce constat,
la brunette avait accompli une image un peu moins glacée de sa personne, et s'était libérée de ses tourments en même temps que d'une bonne partie de la coquille qui s'était cassée. absolument que pour une majorité des brebis, les choses étaient restées toujours aussi superficielles. comment s'est passé ta séance photo ?
est ce que je pourrais devenir mannequin aussi ? j'aimerais tant faire des publicités comme toi... c'est vrai que tu apprends à danser maintenant ?
tu vas devenir une idole ? je pourrais venir avec toi à la fête avec cette belle voiture dans laquelle on t'accompagne ?
tu crois que ton agent pourrais faire de moi un mannequin aussi ? jusqu'à ce que ça la dépasse complètement, que son travail en tant que model ou danseuse ne soit que la seule chose qui les attire vers elle tout en n'oubliant pas de quand même essayer de comprendre leur vision petite de la réalité.
entre photo shootings, tournées publicitaires, cours de musique et cours de danse, la jeune fille semblait avoir tout pour elle, parlant entre les plaintes des adolescentes qui rêvaient d'être à sa place, d'avoir leurs parents pour les pousser dans le monde du show-business. sauf que la princesse ne semblait pas être consciente de sa chance, selon eux
[ ces mêmes opportunistes, ces même tricheurs, ces hypocrites sans scrupule ] elle gaspillait son talent et les efforts de ses géniteurs, en se montrant rebelle. parce que oui, yuan aurait pu débuter dans un groupe dès l'âge de dix-huit ans, mais
elle a dit non, parce que la demoiselle faisait ce qu'elle voulait, ce que lui chantait sa petite tête de linotte. yuan n'était pas une désespérée, elle ne courait pas après la fortune et la gloire. elle composait quand ça lui sonnait à l'oreille et gardait ça dans son placard, elle dansait ou chantait quand ça lui plaisait et n'en faisait pas une obligation. pour remporter du pognon, elle ne faisait rien de plus que regarder la caméra et entendre le petit bruit que celle-ci faisait à chaque cliché du photographe.
lorsqu'elle était fatiguée, elle arrêtait tout, se couchait sur un transat et regardait la piscine sans y plonger. yuan, elle avait un peu perdue sa passion, parce qu'on l'avait transformée en calvaire dès son enfance. apprends-ci, apprends-ça; regarde la caméra, fais semblant de sourire.
les autres, ils voyaient cette torture comme un jeu.