Il existe une journée parfaite pour sauver des vies ? Combien de rides plisseront encore la peau de mon père ? Il est tellement soucieux, surtout ces derniers temps. Il essaie de garder un visage impassible mais je connais bien les petits signes indiquant la fatigue, la colère, etc. Il ne souhaite pas que son divorce ait des répercutions sur moi ? Il me répète souvent que je serai toujours son fils, qu’il m’aimera toujours quoique je décide mais je suis bien trop petit pour choisir entre eux. Je ne comprends pas bien les paroles de mon père, elles sont juste plus chaleureuses que l’absence de celles de ma mère. Cette dernière est une femme froide, incapable d’éprouver le moindre sentiment en dehors peut-être pour son dressing de luxe. Jamais je ne pourrais évoquer un moment où elle a été une bonne mère. Je suis seulement un obstacle dans son existence ou plutôt un point coché sur sa « to do list » concernant son union avec mon père. Cette femme devait donner la vie pour être certaine de rester la fille parfaite que ses parents avaient élevé. Les enfants ? Elle n’en souhaitait pas parce que cela empoisonne son emploi du temps déjà bien chargé. Ils ne cessent pas de « vous causer des ennuis » et ils ont aucun intérêt pour les affaires. Son cœur froid bat uniquement pour l’empire familial : les centres commerciaux de luxe dont son père est le président.
Ce divorce est une période douloureuse dans mon enfance, enfermée au fin fond de ma mémoire ainsi que mon cœur. Nous n’avions certes aucun lien avec ma mère, elle en reste pas moins la femme qui m’a porté pendant neuf mois avant de me donner le jour. Je me rappelle surtout de l’expression de mon père et des propos blessants de ma génitrice envers moi ou son ex-époux. Comment voulez-vous que je crois en un amour indestructible dans de telles circonstances ? Il y avait tant de haine dans les paroles de ma mère. Mon père travailla encore plus après cette séparation. Je restais souvent chez ma mère mais elle n’avait pas ma garde pour autant. Trop heureuse de se débarrasser de « son boulet », elle avait accepté la demande de garde mon père. Le poste de chirurgien cardiaque de mon père impressionnait les avocats alors la question de « l’enfant » fut réglée en quelques secondes. On me traita comme une couverture, on cocha mon nom sur la liste et on m’oublia tout aussi rapidement…
Mon père a toujours fait passer son travail avant sa famille. Ce fut probablement une des raisons qui poussa ma mère a demandé le divorce après dix ans de mariage. Il est passionné ! Comment pourrait-on lui en vouloir ? J’ai appris à composer avec cet amour envahissant pour la chirurgie cardiaque. Il est un super-héros à mes yeux. Il le restera sûrement toute ma vie. C’est un homme gentil mais parfois tête en l’air ! Combien de fois je ne suis pas venu dans son service pour lui rappeler que son domicile était pas son bureau ou encore de prendre ses repas correctement ? Je suis un peu sa maman alors que mon rôle devrait être seulement son fils. Heureusement depuis douze ans, je ne me soucie plus trop de ses oublis incessants de la vie réelle. Il a rencontré ma belle-mère, professeure de piano, en m’emmenant à un de mes cours. Pourquoi gâcher mon talent ? Je suis plutôt doué pour la musique autant faire quelque chose qui me plaisait. Ce fut le coup de foudre lors de leur rencontre ! Ils se sont vus en cachette comme des adolescents pendant des mois avant que je mette les choses au point avec eux. Ils voulaient me préserver parce que mes parents avaient divorcé. Yuri ne souhaitait pas remplacer ma mère ? J’attendais que ça ! Je serai bien incapable de vous dire à quoi ressemble ma vraie mère puisque nous avons plus de contact en dehors des anniversaires. Ma professeure de piano était l’exacte opposée de ma mère : chaleureuse, drôle, généreuse, sensible. Elle était parfaite pour nous deux. Je fus le plus heureux des garçons au second mariage de mon père.
Rapidement cette nouvelle famille accueillit un nouveau membre en la personne de ma petite sœur : Hyun Ae. Cette chipie est pestouille mais terriblement adorable. Je suis toujours incapable de lui dire « non », elle me mène par le bout du nez. Je suis gaga de cette enfant ! Ma vie prenait un tournant beaucoup plus doux que mes premières années sur cette terre. Une vraie famille ! Des études qui fonctionnaient assez bien ! Que demander de plus ? Un petit ami ? Soyons clair maintenant : les filles beurk ! Impossible pour moi d’avoir des sentiments pour elles. Elles sont ultra chiantes !!! Dites pas le contraire ! Qui vous casse les pieds pour avoir la salle de bain ? parce que vous avez pas fait un compliment sur leur tenue ou leurs chaussures ? Qui vous demande constamment si on les aime ? Si elles ne sont pas trop grosses ? Qui réclame trop d’attention ? La liste de leurs défauts serait tellement longue que je stopperai ici. Mon cercle d’amis compte de nombreuses filles mais jamais cela ira plus loin avec elles. Les hommes sont beaucoup plus simples, enfin en apparence. Les relations entre hommes sont tout aussi compliquées que celles des hétéros. Cela me dérange moins parce que j’aime sentir des muscles fermes sous mes doigts, entre mes cuisses. J’aime les rapports de force entre nous. Je veux que l’on me tienne tête parce que je peux me montrer affreusement borné. Les « bénis-oui-oui » très peu pour moi ! Maintenant que cette question est réglée, passons à mon premier amour… celui que l’on n’oublie pas !
Je soufflerai mes dix-sept bougies dans quelques mois quand nous avons fait connaissance lors d’un cours de sport au lycée. Il avait tout du type populaire auprès des filles : il était beau, souriant, serviable et drôle. Elles faisaient d’ailleurs la queue pour lui apporter son déjeuner ou encore lui offrir des cadeaux. Mes potes étaient tous jaloux de lui alors que je rêvais seulement d’attirer son attention. Je le voulais pour moi mais encore top jeune, je me sentais pas assez en confiance pour afficher ouvertement mes préférences sexuelles. Il en a joué… Nous nous sommes retrouvés seuls dans un placard afin d’échapper au cours de sport. Ce fut la première fois que nous nous sommes embrassés. Jamais je n’oublierai les battements affolés de mon cœur quand nos lèvres se sont rencontrées pour cette danse sensuelle. Je me sentais important ! Nous sommes sortis ensemble pendant deux ans. On se voyait en secret parce que je ne savais pas comment dire aux miens que j’étais homosexuel puis il n’avait pas envie de me partager avec les autres. J’étais totalement dingue de ce type…
Notre rupture restera à jamais gravée dans ma mémoire… nous étions ensemble depuis deux ans. Je me voyais bien continuer avec lui encore longtemps. Je me sentais même prêt pour faire mon coming out auprès des miens quand il prit la décision de tout ruiner mais surtout de réduire en miettes mon cœur. Nous devions nous retrouver avec le gala de charité que nos parents fréquentaient la veille de mon anniversaire soit le 30 décembre. Je me sentais comme un pingouin coincé dans un costume trop serré pour lui. Je le cherchais des yeux pour avoir un point d’ancrage parmi cette foule qui me rendait mal à l’aise. Ma mère était présente aussi mais elle ne m’adressa pas la parole une seconde. Quand on annonça les fiançailles du fils prodigue, je paniquais en espérant que cela n’aurait aucun rapport avec lui. Mon regard trouva finalement le sien mais il exprimait uniquement son dégoût pour ma personne. Il se passait quoi ? Mon petit ami allait épouser une autre ? Pourquoi ? J’avais la sensation de me noyer devant toute cette assemblée et personne qui me tendait la main pour me venir au secours. Je quittais le gala pour laisser les larmes coulées. Il ne me chercha pas une seule seconde, il resta parmi les invités qui lui présentaient leurs félicitations. Nous nous ne sommes pas adressé la parole pendant deux jours puis y tenant plus je suis allé demander des explications. Il me balança que notre relation était juste un amusement, une façon d’avoir pour lui quelqu’un sous la main quand il en avait besoin. Il n’avait jamais eu de sentiments pour moi et il n’aimait pas les hommes. Comment était-ce possible ? Il avait juste eu envie de tester puis je lui faisais pitié avec mes grands yeux énamourés alors il avait accepté de me sortir avec moi même si au final il y avait pas de couple. Ce fut comme un coup de couteau planté en plein cœur… ce fut aussi douloureux que le divorce de mes parents. Mon monde disparaissait sous les flots sans que je ne puisse rien faire. PLUS JAMAIS JE NE TOMBERAI AMOUREUX ! PERSONNE N’AURA A NOUVEAU UNE EMPRISE SUR MON CŒUR ! Ses promesses sont marquées au fer rouge dans ma tête mais aussi sur mon organe cardiaque. Il est hors de question que je me retrouve encore détruit par un homme. Il a fallu des années pour que je trouve la force de repousser ma souffrance dans les méandres de ma mémoire. Mes relations sont désormais un rapport de force que je remporte haut la main parce que je ne me laisse pas soumettre. Je commande ! Si cela ne vous plait pas, passez votre chemin. Pas la peine de sortir de la psychologie à deux balles : oui je me préserve des relations intimes en m’engageant dans une histoire sérieuse. Personne ne me fera changer d’avis !
La musique… mon univers, ma passion ! Je suis tombé amoureux du piano alors que j’avais six ans en écoutant un concerto pour piano de Beethoven. Mes parents ont choisi de m’inscrire à des cours parce que j’étais un enfant bizarre, trop adulte pour eux comme ils se comportaient tels des enfants. J’appris rapidement à maitriser cet instrument qui reste mon refuge quand tout va mal. Je m’allonge en-dessous et fixe le bois du coffre, imaginant que l’apocalypse a lieu dehors mais que tout va bien pour moi. Je compose aussi sous mon piano. Non, je ne suis pas bizarre ! Ne vous y mettez pas ! En dehors du piano, je joue aussi de la guitare acoustique et de la batterie. Pourquoi ne pas former un groupe ou devenir une idole ? Les strass et les pets de paillettes très peu pour moi. Je veux pouvoir sortir dans la rue sans avoir une horde de folles furieuses qui me poursuivent. Je ne veux pas craindre pour ma vie parce que des gamines écervelées ont foutu de la colle dans ma boisson ou du poison. Laissez-moi en dehors de toutes ces conneries. Je compose des chansons, cela me va parfaitement ! Il y a pas eu un évènement déclencheur qui me mena chez JOY PLAY. Je gribouillais des musiques dans mon coin puis les déposait à l’agence quand je ne proposais pas des remix en modifiant des morceaux complets de mélodie. Mon travail devait plaire parce que je fus convoqué dans leurs bureaux pour avoir une place parmi leur équipe. Je suis un peu ermite quand je travaille : je dors, je mange, je vis musique. Il est difficile de me faire quitter le studio quand je suis inspiré sinon je bosse chez moi avec un amant allongé dans mon lit.