Titre : Génocide ouïgours : drame sur fond de l'unification d’une population
Image : (random)
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https://static.yabiladi.com/files/articles/95834_53dccd878fa202e891d41bf02b32b4ed20200701122720_thumb_565.jpgCela fait maintenant de longs jours que la question des ouïgours est au cœur des débats. Longtemps discutée sur les réseaux sociaux après de nombreux apports des lanceurs d’alertes, la politique internationale et la diplomatie s’en mêlent. Vendredi 31 Juillet, Washington prend la décision de geler les avoirs de la société Xinjiang Production and Construction Corps, qui dirige ses propres installations, universités et médias dans cette région du nord-ouest de la Chine. Les Etats-Unis justifient leurs décisions en accusant Pékin de violer les droits des communautés musulmanes présentes en Chine.
La question des ouïgours n’est pourtant pas nouvelle. La minorité ouïgours obtient à deux reprises, au milieu du XX
e siècle son indépendance. Dans les deux cas, l’indépendance est de courte durée. La Chine ne laisse pas le Xinjiang partir aussi rapidement.
Isolé, extrêmement éloigné de Pékin (choisissez entre 6h en avion, et près de 30h en voiture), il n’est pas étonnant de voir un rapprochement s'opérer avec les pays voisins du Tadjikistan et du Kirghizstan. D’autant plus qu’ils comptent une même communauté, ayant le même langage, la même tradition, la même religion : les ouïghours. Ces similitudes en font autant de différences envers l’ethnie majoritaire chinoise, les hans.
Avec près de 60 ethnies, difficile de voir apparaître une quelconque unification derrière l’État chinois, et encore moins une identité nationale commune. La République Démocratique de Chine (RPC) l’a perçu rapidement. Elle a ainsi mis en place des aides et a grandement encouragé de nombreuses familles hans à s’installer au Xinjiang. Ainsi, en l’espace de 50 ans, les ouïgours sont passés de 80 % de la population du Xinjiang à moins de la moitié.
Sans surprise, le sentiment d'appartenance national est bien loin. Devant les inégalités de traitement entre ouïgours et hans, les violences sont multiples. En 2009, une manifestation contre les discriminations subies par les ouïgours finie en bain de sang. 200 personnes sont tuées, des centaines de blessés sont à déplorer. Les discriminations se font toujours plus présentes poussant certains membres des communautés musulmanes dans les mains des attentats suicides et autres attaques terroristes. Dans un contexte de la guerre civile en Syrie, mais de beaucoup d'autres affrontements (Yemen, Somalie, Boko Haram, Libye et bien d'autres), nombre de ouïgours rejoignent les rangs de Daesh. Il n’en fallait pas plus à Pékin pour sauter sur l’occasion et trouver l’occasion de lancer des politiques de « dé-extrémisation » à partir de 2016. Des injonction sont alors faites pour débusquer les communautés musulmanes. Il s'agit de leur faire perdre leur différence, leur culture, leur tradition et leur faire adopter le mode de vie chinois. Par exemple, il est demandé aux hommes de raser leurs barbes. On interroge les enfants à l’école sur leur consommation de viande de porc. C'est un processus en soi assez vieux, que l'on retrouve déjà dans le processus de construction de l'Etat moderne occidental (interdiction des langues régionales à l'école de la III
e République par exemple) .
Là où se distingue la RPC est sur son habilité à pouvoir s’appuyer sur une police à la pointe de la technologie. La population ouïgour est ainsi invitée à se présenter aux différents guichets présents dans la rue pour faire vérifier leur téléphone. Leurs maisons sont recensées et référencées par un QR code qui est régulièrement vérifié par un officier.
Enfin, c’est en 2017 que les premières rumeurs de construction de camp de « réducation » et de « dé-extrémisation » apparaissent. La Chine se défend de la construction de ces camps avec la carte de la menace terroriste (et séparatiste). A l’intérieur, on encourage les prisonniers à critiquer leur religion, à chanter l’hymne chinois. Plus grave, tortures, viols et meurtres sont monnaie courante. De plus, les centres servent d'usines à bas-couts pour de sous-traitants de nombreuses grandes marques (Adidas, Nike, Uniqlo, Zara, pour ne citer que quelques exemples).
Devant tant d’obstacles, on ne peut que s’interroger sur l’intérêt de la Chine à garder cette région. Elle n’est en effet pas la plus accueillante. Semi-désertique, vaste, comptabilisant de nombreux reliefs, on peut s’étonner de voir la Chine s’accrocher à ce point à cette terre. Le constat est pourtant très simple. La production de charbon du Xinjiang représente 40 % de la consommation chinoise. Le Xinjiang comptabilise également entre 20 et 30 % du pétrole consommé dans le pays. Il est vital pour la Chine de garder le Xinjiang. D’autant plus, que la nouvelle route de la soie, en chinois pour le plaisir 一带一路, dévoilé en 2013, passe par la région.
Une seule chose semble sûre : pour Pékin, le Xinjiang sera chinois, quel qu'on soit le coût humain.
Source :
https://www.rfi.fr/fr/ticker/ou%C3%AFghours-washington-sanctionne-une-importante-organisation-paramilitaire-chinoise (décision américaine)
https://journals.openedition.org/remmm/12422 (problématique des ouïgours rejoignant daesh)
https://www.youtube.com/watch?v=cMkHcZ5IwjU (petite vidéo de Vox sur le sujet, un peu vielle (1 an) mais résumant bien le sujet)