C’était un beau jour de janvier en cette année de 1993, et j’étais là, tout beau, comme un petit prince dans son berceau. Seulement, quelques minutes plus tard, je n’étais plus seul dans ce berceau. Des jumeaux, et oui, de faux jumeaux sachant que c’était une fille à côté de moi, une petite Saeri qui était tout aussi mignonne. Seulement, cette princesse et moi, nous nous sommes pas vus très longtemps. C’était assez simple pour n’importe qui de voir que même avec deux enfants, mes parents ne s’entendaient pas. Ma mère, cette hystérique, ne se sentait pas assez bien dans ce palace que lui avait offert mon père. Non, elle en voulait plus, elle criait comme si sa vie en dépendait. Comme si elle était la femme la plus triste au monde avec deux magnifiques enfants pourtant. Mais non. Elle s’en fichait de ses enfants, il faut croire. Elle était partie comme ça, avec nous certes, mais alors que mon père n’était pas là. Sans une réelle conversation. Puis peu de temps plus tard, la nouvelle tomba. Le prince allait être séparé de la princesse, elle allant chez la sorcière, et moi chez mon père. Depuis ce jour, mon père ne cessa de me rappeler l’existence de ma sœur, de celle qu’il aurait aimé voir plus que deux petites années, qui aurait bien vécu, dans la sécurité et la richesse avec lui.
Moi ? J’étais bien, au début, j’étais heureux de ma vie de “fils unique”. S’il y avait une surprise, c’était pour moi, un cadeau, pour moi. C’était assez simple. Alors pourquoi penser à autre chose ? Le monde est géant, mais il est y a toi. Et toi pendant que tu te regardes dans le miroir le matin, toi. T’es beau. Tu n’as pas besoin de l’entendre de la bouche des autres, tu le sais. Alors pourquoi penser à autre chose ? Après, bien sûr que les gens me le disais que même enfant, j’étais adorable et beau comme un Dieu. Que ça soit à Séoul, là où mon père vivait ou pendant nos voyages au Japon et un peu partout en Asie, tout le monde était d’accord sur une chose : j’ai toujours été beau.
Et pour être encore plus beau, pourquoi ne pas faire en sorte que ce corps servent à quelque chose ? C’est très tôt que je me suis intéressé à la danse, et en voyant ma passion pour ce sport, mon père engagea rapidement les meilleurs professeurs de danse qu’il connaissait. Il a toujours des vidéos de mes premiers cours de danse, que j’espère que personne ne verra, jamais. Mais en attendant, même avec l’école et la danse, les voyages, ça ne m’empêchait pas d’être toujours intéressé par celle que j’avais perdu. Juste une petite nouvelle, savoir comment elle allait, ce qu’elle faisait, à quoi elle ressemblait maintenant, mais non. Plus rien. Néant. La sorcière pouvait l’avoir sacrifié que je n’en aurais aucune idée. Et mon père n’était pas d’une grande aide là-dessus. Tout ce dont j’avais été ses mails entre nous, des mails rassurants, mais qui paraissait si faux.
Quand j’arrivai vers mes 10-12 ans, mon père s’est mis à essayer de se trouver une autre femme, et honnêtement, je sais toujours pas pourquoi il a passé autant de temps à penser à la sorcière plutôt que d’essayer de l’oublier. Sérieusement, je me demande toujours qu’est-ce qu’elle pouvait avoir qui l’avait attiré, comment il avait fait pour se marier avec. Si ça se trouve elle était différente avant, mais celle que j’ai vu et dont je me souviens n’était qu’une folle qui se plaignait toutes les minutes de sa vie parce qu’elle n’avait pas eu son thé de la journée. Bref. Il a ramené assez de femmes différente à la maison, et ça presque de jour en jour, comme s’il voulait mon avis sur laquelle était la bonne. Ou alors c’était juste qu’il trouvait pas l’utilité de cacher à son fils ses conquêtes, ce que je vais pas juger non plus. Après tout, avec qui il était, je m’en fichais du temps que ce n’était pas une femme comme ma mère, ou ma mère. Il pouvait faire ce qu’il voulait du temps que je n’en savais rien, et que j’avais toujours la danse. Tout ce qu’il me demandait en échange était des bonnes notes à l’école et que je continue à la danse donc on était sur la même longueur d’onde.
Le collège fut vraiment ce qui me fit me rendre compte d’une chose. La danse, c’est cool, mais c’était pas assez. Il me fallait plus. Quelque chose qui ferait que je serai quelqu’un, non pas pour être quelqu’un de spécial, mais parce que je le sentais au fond, c’était ma destinée. C’est donc à mes 13 ans que je commençai le chant, seul de mon côté, pour ne pas être vu de mon père, de peur qu’il aille se dire que la danse oui, mais le chant était une passion trop… Efféminé. Il faut croire que j’ai toujours eu peur de cette image pour une certaine raison. Peut-être parce qu’au collège, pour une raison que je ne connais toujours pas, les personnes autour de moi me voyaient gay. J’avais même certains mecs qui venaient pour me déclarer leur flamme sauf que… Non. Déjà… J’avais 13 ans. Ensuite. Non. Juste pourquoi on me pensait gay j’en sais rien, ça me trotte toujours dans la tête aujourd’hui. Parce que ses personnes qui jugent sans savoir, qui te prenne de haut sans te connaître, et voilà comment te gâcher une enfance en quelques rumeurs. Si leur preuve était que j’avais pas de copine ou pas de mère, ou pas spécialement d’amis filles, c’est les preuves les plus idiotes que j’ai vu de ma vie. En parler à quelqu’un ? Quoi j’aurai dû prendre un psy pour dire qu’on me pensait gay ? Le dire à ma sœur ? Oui et quoi encore. Arrivé au plein milieu et dire “ Eh, tu sais quoi, j’ai eu un mec qui m’a fait une lettre en me disant qu’il pouvait le dire à moi sachant que j’étais gay sauf que je suis pas gay” non. Juste non. Une anecdote et rien de plus.
À la sortie de cet enfer, la sortie du collège, c’était pour moi une façon de tenter le tout pour le tout en essayant de faire ce que je voulais faire, ou du moins le premier pas, devenir idole. Mon père là-dedans ? Ah, il en avait un peu rien à faire du temps que j’étais heureux apparemment. Alors je tentai ma chance un peu partout, mais apparemment mon niveau n’était pas assez bon pour eux, je me souviens particulièrement d’une des raisons de refus d’une des agences : Trop jeune, manque d’expérience. Je me souviens de mon visage en voyant ça. Faut croire qu’ils ont pas compris qu’être jeune et avoir de l’expérience c’est pas toujours le plus simple. Mais ce n’était que la JOY PLAY et ce n’était pas la première fois qu’ils refusaient un talent. Je trouvai ma place à la DREAM, qui m'avait accueilli comme dans une nouvelle famille. D’ailleurs, c’était comme s’il avait quelque chose de tout tracé pour moi, et cette impression était toujours belle. Malgré ça, il m’a fallu attendre mes 18 ans, le 13 mars 2011 exactement, avant de monter pour la première fois sur scène comme étant membre d’un groupe. Et je n’oublierai jamais ce jour, toutes ses personnes devant nous, leurs sourires, leurs cris, et encore mieux au fil du temps, les entendre crier mon nom. C’était tout ce que je voulais, ce que j’attendais. Et nous étions pourtant si jeunes, mais j’étais fier d’être le leader d’un groupe qui à mes yeux avait tout pour réussir.
J’avais faux. Il n’a pas fallu longtemps pour voir que rien ne marchait. Certains d’entre nous ne s’entendaient même plus, l’agence nous laissait de côté, et les médias même nous oubliait. Et un an plus tard, c’était déjà à l’eau. La dissolution du groupe n’était pas officielle, mais tous, on savait très bien que ça allait arriver. Et moi, je me sentais comme un incapable. J’étais censé être celui qui porter les fardeaux sur mes épaules, un leader, et au final, je n’étais rien. Est-ce que j’avais le talent déjà ? Est-ce que je pouvais me démarquer des autres idoles ? Non. Je n’étais rien d’autre qu’un pion. Notre agence a décidé de faire dissoudre notre groupe d’une drôle de façon, en faisant une dernière chanson, puis plus rien. Deux ans après mes débuts, j’étais revenu au rang de trainee presque. Et non, les gens ne se souvenaient pas de mon nom, ni de n’importe quel membre, on avait disparu, ou juste pas existé. Voilà, nous n’avions jamais existé.
Je recevais toujours les mails de ma sœur, me disant que tout irait bien, mais au fond, j’en doutais grandement. Mon père devait sûrement me voir comme un échec lui aussi. À ce moment-là, j’ai commencé à essayer de faire passer ce vide en moi en essayant tout, m’entraîner plus, plus dur chaque jour, il y avait des nuits où je ne dormais pas, des journées sans pauses. Puis j’essayai de toucher à tout : écriture, composition, arrangement, chorégraphie, tout. Pour finalement apprendre la nouvelle, un an après, ma sœur était là. Je me souviens de la joie que j’avais de la revoir, et encore plus de la savoir soliste. Elle allait briller comme elle le devait, et j’allais pouvoir la voir faire ce qu’elle faisait de mieux. Pendant que moi. J’étais là. Coincé. Au fond, c’était de la jalousie. Je le sais. Mais je pouvais pas m’empêcher de lui en vouloir un peu, c’était comme si elle venait et avait tout alors que je n’avais plus rien. Mais c’était ma sœur, ma moitié, comment lui en vouloir.
Abandonner n’est pas mon genre, tout le monde le sait. Donc, non, j’ai renouvelé mon contrat avec la DREAM et j’ai continué à y croire. Pour une fois, j’avais raison, il semblait qu’enfin, il y eût quelque chose pour moi et quelque chose qui pouvait être plus personnel, un duo. Avec un mec sympa en plus. Et peut-être qu’avec ça, tout irait bien, tout irait mieux. Ce duo nous poussait à montrer le mieux de nous deux et… Je pense qu’au fond, c’est tout ce qu’il manquait. Un truc drôle, avec le début du duo, j’ai repris un peu contact avec ma sœur aussi. Et les médias sont allés direct vers “couple”. Honnêtement, ma sœur est magnifique, mais c’est ma sœur. C’était assez drôle en tout cas, puis ça reste toujours une anecdote entre nous.
Après… Les médias ont jamais arrêté. Que j’essaie d’avoir des relations qui dure, ou qui ne dure pas, ils étaient là, à mes trousses. Est-ce que ça me gêne ? Non. Ils peuvent penser ce qu’il veuille, ils ont bien cru que ma sœur était ma copine après tout. Puis il y a eu le retour de la question de ma sexualité et… Qu’est-ce qu’ils en ont à faire en vrai. Mais le duo marchait, enfin, je retrouvais la joie de la scène, des cris, des fan chants, des lumières. C’est toujours aussi beau. Mais rien ne dure apparemment, et il fallait que l’on soit encore en pause même aujourd’hui. Alors que je faisais mes chansons dans mon coin et les poster quelque part sur Internet pour laisser une vraie chasse à la chanson pour mes fans, ma sœur était en tournée mondiale. Non pas que je ne pense pas qu’elle le mérite, elle le mérite totalement ! C’est juste qu’un jour, j’aimerais pouvoir faire pareil qu’elle, briller comme je le dois. Parce qu’avec une tête comme la mienne, on reste pas dans un placard à pourrir.